mardi 15 octobre 2019
POURQUOI BÂILLE-T-ON ?
Le bâillement est un réflexe qui existe non seulement chez l’être humain, mais aussi chez tous les vertébrés. C’est un comportement bien connu et fréquent : un homme bâillerait en moyenne 250 000 fois au cours de sa vie. Mais que sait-on de ce phénomène ?
Jusqu’au siècle dernier, on pensait que bâiller permettait l’oxygénation du cerveau, mais cette théorie a par la suite été écartée.
Dans l’Antiquité, Hippocrate pensait que cette contraction musculaire involontaire et puissante permettait d’évacuer la fièvre comme le ferait une cheminée. Des siècles plus tard, le Hollandais Joannes de Gorter pense que ce comportement augmente la circulation du sang dans le cerveau pour lui apporter davantage d’oxygène. Une théorie qui persiste depuis le XVIIIe siècle alors qu’elle est fausse. «Des travaux ont, en effet, montré que le taux d’oxygène dans le sang tend à baisser brièvement après le bâillement, relève le médecin. Par ailleurs, la période de la vie où on bâille le plus est la vie fœtale. Une période durant laquelle on vit dans du liquide. Les poissons bâillent aussi. Or ce n’est pas dans un liquide que l’on peut faire le plein d’oxygène en respirant».
En fait, le bâillement serait déclenché par une augmentation de la température du cerveau[1], qui se produit souvent lorsqu’on est fatigué, qu’on s’ennuie, qu’il fait chaud ou qu’on est malade. Bâiller a un effet thermorégulateur qui nous permet de retrouver de la vigilance.
Concrètement, bâiller augmente le flux du sang artériel et permet un flux de sang plus frais au cerveau.
La fatigue, l’ennui, la faim ou au contraire la satiété… De nombreuses situations nous conduisent à bâiller à nous en décrocher la mâchoire. Nous, les humains, mais aussi tous les animaux car ce comportement physiologique est universel. Tous les vertébrés vivant dans les airs, l’eau ou sur terre baillent. «Il est curieux de voir qu’un comportement qui ne sert apparemment à rien a été conservé, inchangé, au cours de l’évolution», glisse avec amusement le Dr Olivier Walusinski, médecin généraliste aujourd’hui à la retraite qui étudie depuis des années cet étonnant comportement.
Bâiller pour retrouver son calme
Alors à quoi cela sert-il de bâiller? Encore aujourd’hui, c’est un mystère. «Le bâillement est associé au cycle veille/sommeil. Mon hypothèse est qu’il servirait à stimuler notre vigilance», suggère le Dr Walusinski. Et de poursuivre: «Au cours de la journée, nous accumulons plusieurs facteurs somnogènes dans le liquide céphalorachidien. Bâiller favoriserait leur élimination».
En revanche, les chercheurs qui se sont penchés sur la question ont pu décrire les circonstances dans lesquelles le bâillement apparaît. Signe d’ennui ou de fatigue, le bâillement peut aussi être déclenché par l’anxiété. Dans ce cas, bâiller permet de retrouver le calme après un moment de stress.
Le bâillement, signe de certaines maladies
Par ailleurs, certaines maladies ou traitements modifient sa fréquence. Alors qu’une personne en bonne santé bâille entre 5 et 10 fois par jour, certains patients atteints de la maladie de Parkinson, les consommateurs de neuroleptiques, d’opiacés ou de drogues ne baillent plus ou très rarement. À l’inverse, les antidépresseurs (en particulier les inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine) augmentent la fréquence des bâillements. «Sans que l’on sache pourquoi, certains patients traités par cette famille de médicament bâillent 50 à 200 fois par jour. Cela survient par salves de 15 à 20 bâillements, ce qui est très handicapant socialement et physiquement désagréable», décrit le médecin. Un excès de bâillements peut aussi être le signe d’une hypertension intracrânienne due à la présence d’une tumeur, être associé à des formes d’épilepsie ou à une sclérose en plaques.
Le curieux phénomène de contagion intéresse aussi les chercheurs et les psychologues. À l’image du rire ou des pleurs, la réplication du bâillement fait appel à la théorie de l’esprit, c’est-à-dire la capacité d’adopter le point de vue de l’autre et de décoder son état émotionnel. Cette aptitude mentale est observée chez l’homme, les grands singes et serait retrouvée chez l’éléphant, les perroquets et peut-être d’autres espèces.
Mais nous ne sommes pas tous dotés de cette capacité de compassion. «Environ trois-quarts de la population est sensible au bâillement, et ce d’autant plus qu’un lien affectif nous lie à cette personne», indique le Dr Olivier Walusinski. Fait amusant: des publicitaires ont montré dans les années 1960 que les personnes les plus sensibles aux bâillements des autres sont aussi les plus réceptives à la publicité…
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